« Les clients de la prostitution » (extrait de l’ouvrage-enquête)

« Présentée comme libertaire, l’industrie du sexe est en train de légitimer un retour en arrière phénoménal pour les femmes ; un abandon, pour ne pas dire un reniement des politiques progressistes mises en oeuvre ces dernières décennies. Légaliser la prostitution est en contradiction totale avec le long combat mené par les femmes pour leur dignité et leur autonomie, leur accès au travail créateur, la valorisation de leurs compétences, leur promotion sociale, économique et politique. Une nouvelle fois, les femmes sont renvoyées à leur fatalité de toujours : tout en elles serait sexe et vénalité. Proxénètes et pornographes, sur ce point, font alliance avec les puritains. La croyance des machos se voit confortée. La place des femmes est au lit et aux fourneaux, leur indécrottable destin tient à trois devoirs : service maternel, service domestique, service sexuel. Ce vieux réflexe sent franchement le XIXème siècle. On croirait revenir au temps où certains patrons, sous-payant leurs ouvrières, les incitaient à faire le trottoir après leurs heures de travail*.

L’abdication que constitue la normalisation de la prostitution aura pour première conséquence d’accroître l’acceptation de l’exploitation sexuelle. Comment lutter d’une main contre le harcèlement sexuel, et l’encourager de l’autre s’il est rémunéré ? Est-il cohérent d’inviter un client à se permettre dans un sex-club les mots et les gestes qui l’enverraient au tribunal dans le cadre de son entreprise ? Peut-on condamner le viol, appropriation du corps d’autrui par la contrainte, et fermer les yeux sur la prostitution, appropriation par l’argent ? On ne s’étonnera pas d’assister à une érotisation croissante des corps, notamment des adolescent-es et des enfants, ni d’une éventuelle révision à la baisse de l’âge de la majorité sexuelle afin de dégager un nombre croissant de corps disponibles. La violence sexuelle, déjà largement célébrée dans les médias, a de beaux jours devant elle ».

* Marie-Victoire Louis, Le droit de cuissage.

Les clients de la prostitution, de Claudine Legardinier et Saïd Bouamama (extrait)

~ par chaminou sur 16/12/2012.

3 Réponses to “« Les clients de la prostitution » (extrait de l’ouvrage-enquête)”

  1. « On ne s’étonnera pas d’assister à une érotisation croissante des corps, notamment des adolescent-es et des enfants, ni d’une éventuelle révision à la baisse de l’âge de la majorité sexuelle afin de dégager un nombre croissant de corps disponibles.  »

    ==> Et ce d’autant plus que la population. Et comme la jeunesse, essentiellement chez les femmes, est perçue comme un indice d’attractivité sexuelle…

    • Oui, sans doute un rapport avec la fécondité, une fois de plus… A ce stade, la majorité sexuelle peut tomber bien bas !

  2. Bonjour,

    doctorante en science politique à l’Université Montpellier I (laboratoire CEPEL CNRS), je réalise une thèse sur la blogosphère.
    En acceptant de répondre à ce questionnaire (temps estimé : 15 min), vous apportez une aide précieuse à mes recherches.
    Vos réponses seront traitées de façon confidentielle.

    En vous remerciant,

    Voici le lien vers le questionnaire :

    https://docs.google.com/spreadsheet/viewform?formkey=dHZZSVdhWGxzZjZMbmluTXVWVkFGV0E6MQ#gid=0

    Cordialement,

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